Les allergies alimentaires chez les enfants
Samedi dernier, vous êtes allés chez belle-maman pour le brunch et votre petite princesse de deux ans a littéralement dévoré le plateau de biscuits au beurre d’arachide de sa mamie. Quelques minutes après le premier biscuit vous avez remarqué l’apparition de petites plaques rouges autour de la bouche qui s’étendaient à vue d’œil! Malgré l’absence d’allergie dans la famille vous soupçonnez tout de suite qu’il pourrait s’agir de cela et vous vous présentez à la clinique la plus près de chez vous. Vous en ressortez avec une prescription d’Épipen et un rendez-vous de suivi avec votre médecin de famille. Qu’en est-il de la suite? Que c’est-il passé pour que princesse développe cette allergie? Comment gérer le garde-manger et éviter les carences alimentaires? Est-elle à risque de développer d’autres allergies? Est-ce que ceci peut avoir un lien avec l’intolérance au lactose de son frère de 8 mois? Dans ce texte, je tenterai d’éclaircir pour vous ces points et de démystifier les allergies et intolérances qui compliquent la vie de milliers de parents!
L’immunité à la base des allergies
Le système immunitaire est ce qui nous défend contre les agressions extérieures. Malheureusement dans certaines situations, comme les allergies, c’est ce même système qui est en cause. Le corps perçoit l’aliment fautif comme s’il était un danger et relâche alors des immunoglobulines visant à l’éliminer. Le plus souvent, il s’agit des IgE (immunoglobuline E) qui sont en cause, mais il existe d’autres mécanismes cellulaires. Ceci engendre une cascade de réponses inflammatoires qui sont à la base des symptômes d’une réaction allergique. Dans le cas du beurre d’arachides, il s’agit d’une réaction immunitaire de type IgE. Ces réactions se caractérisent par l’apparition rapide de symptômes cutanés (les plaques rouges) auxquels peuvent s’ajouter des symptômes oculaires, digestifs, respiratoires, cardiovasculaires ou même neurologiques. Il s’agit d’une réaction anaphylactique. Généralement, ces symptômes surviennent rapidement, dans les secondes ou minutes suivant l’ingestion, mais peuvent prendre jusqu’à 2 heures avant d’apparaitre. D’autres aliments que les arachides peuvent bien sûr produire ce type de réaction. Les œufs, les noix, les poissons et les fruits de mer, ainsi que le blé, le soya et le sésame sont des aliments que l’on retrouve souvent dans ces types d’allergies.
La prise en charge
Lorsque vous faites face à ce type de réaction, il faut évidemment consulter un médecin. Si la réaction semble impliquer des symptômes respiratoires (toux, essoufflement, bruits respiratoires), il est préférable de se rendre à l’urgence, ou même d’appeler une ambulance dans le cas où la difficulté semble importante. Selon la gravité de la réaction, il est possible qu’une injection d’adrénaline soit nécessaire pour stabiliser votre enfant, ainsi que d’autres médicaments visant à diminuer la réponse inflammatoire. Par la suite, si une allergie est bel et bien soupçonnée par le médecin, votre enfant sera référé en spécialité. Un test sera alors effectué pour diagnostiquer officiellement l’aliment en cause de cette réaction. Ce test consiste à faire de très petites incisions superficielles sur la peau avec des extraits d’aliments. La réaction cutanée par la suite déterminera la présence d’allergie ou non. Parfois, les délais de référence en spécialité sont plutôt longs. Il est donc fortement recommandé d’avoir en main un auto-injecteur de type Épipen dès qu’une allergie est soupçonnée par un médecin et également d’éviter tout contact avec le type d’aliments qui a occasionné cette réaction.
Par la suite, au quotidien
Au Canada, la loi sur l’étiquetage alimentaire oblige les fabricants à déclarer la présence d’allergènes courants ou de leurs produits dérivés. Il faut donc prendre le temps de lire les étiquettes avant de choisir certains produits et éviter ceux portant la mention « peut contenir des traces de... » ou « peut avoir été en contact avec… ». Il faut également faire attention à la contamination à la maison par les ustensiles utilisés pour le beurre d’arachide par exemple. La vigilance reste de mise et fera partie de votre quotidien. Il faudra également penser à aviser la garderie ou l’école de ce nouveau diagnostic. De plus, personnellement je conseille aux personnes allergiques de tous âges de porter un bracelet d’identification médicale (type médicalert). Ces bracelets peuvent sauver une vie en cas de réaction grave sans témoin pour nous orienter.
Par la suite, l’évolution des allergies dépend surtout de l’aliment en cause. La majorité des allergies vont disparaître durant l’adolescence, sauf celles aux arachides, noix, poissons et fruits de mer. 20 % des enfants allergiques aux arachides pourront tout de même développer une tolérance avec l’âge. Un suivi en nutrition, ou du moins une première évaluation est à envisager afin d’éviter une carence alimentaire dans tout type d’allergie. La nutritionniste saura vous donner les trucs nécessaires pour éviter certains aliments sans nuire à la bonne alimentation de vos enfants. Pour ce qui est des allergies « croisées », à savoir si votre enfant est plus à risque de développer une allergie avec un autre type d’aliment, cela dépend aussi de l’aliment en cause. On retrouve une réaction croisée entre les fruits de mer, les mollusques et les crustacés plus fréquemment qu’entre les arachides et les légumineuses.
Un mot sur les intolérances
De nos jours, médicalement parlant, il n’est plus recommandé d’utiliser le terme « intolérance ». Il nous est plus utile de faire référence aux maladies en causes. Par exemple, l’intolérance au lactose est plutôt un signe de déficit en lactase, l’enzyme qui doit dégrader la protéine du lait. Au quotidien, dans votre frigo, ce débat ne change rien par contre! Nous allons donc nous concentrer ici sur les symptômes et ce que vous pouvez faire à court terme si vous soupçonnez que votre enfant fait partie de ce club.
Malheureusement, le lactose se retrouve dans tout ce qui est fait à base de lait de vache, incluant les yogourts, fromage, crème, etc. Ceci peut donc être un joli casse-tête à la maison et en garderie. Les symptômes associés à cette allergie sont très variables. Il peut s’agir de vomissements, crampes abdominales, diarrhées, inconfort, urticaire, sang dans les selles, gaz, etc. Fait intéressant, les bébés allaités ne présentent pas ce type de réaction. Selon l’âge de votre bébé, une préparation où on aura dégradé les protéines du lait sera à privilégier si vous n’allaitez pas et qu’il présente les symptômes mentionnés ci-dessus. Ces préparations se retrouvent en pharmacie, par exemple Alimentum ou Nutramigen. Le lait de soya n’est pas recommandé avant l’âge de 6 mois. Pour ce qui est du lait de chèvre ou de brebis, leurs protéines étant semblables à celles du lait de vache, le bénéfice ne sera pas celui attendu.
Un dernier mot sur l’hérédité…
Effectivement lorsqu’il y a des allergies dans la famille proche, le risque de développer une allergie est plus grand. Il n’y a pas de lien direct, mais il s’agit d’un facteur de risque non négligeable, et ce pour tout type d’allergie. Votre médecin vous questionnera d’ailleurs sur ce sujet, passant du rhume des foins à l’urticaire!
En terminant, même si 50 % des soupçons d’allergies alimentaires s’avèrent non-fondés, il est toujours de mise d’en parler à votre médecin en cas de doute concernant un aliment ou un symptôme en particulier. Dans le cas où la crainte serait injustifiée, c’est important de se faire rassurer et dans le cas où le doute serait fondé la prise en charge sera plus rapide.
Article rédigé par Karyne Arsenault, médecin et maman avant tout
Les trucs de Laurence pour une alimentation saine qui complète bien un mode de vie actif.