J’ai eu trop longtemps, ce sentiment d’échec face à mon accouchement.

Il y a déjà 2 ans mon amour que tu as fait ton entrée sur Terre. Une entrée trop bousculée qui laissera pour toujours, sur le bas de mon ventre, une fine ligne blanche. C’était ta porte de sortie, ta délivrance après beaucoup trop d’acharnement. Cette trace me rappelle encore aujourd’hui combien j’ai eu trop longtemps ce sentiment d’échec face à mon accouchement.

On passe 9 mois à se frotter la bedaine, à se faire raconter des histoires heureuses et moins heureuses d’accouchement; d’une, de l’autre et de la voisine de sa cousine. Mais peu importe ces histoires, on se dit (par chance!) que la nôtre ira bien, qu’à nous deux, cet accouchement on va le relever haut la main.

Puis, toi, mon amour, tu as décidé que tu ne voulais pas sortir, même rendu tout prêt de 42 semaines dans mon ventre. Étais-tu trop bien dans mon ventre? Je pense que déjà, à ce moment-là, j’essayais de me déculpabiliser du fait que mon corps ne se mettait pas en marche comme prévu. Encore, cette maudite pression de performer; je ressentais un sentiment d’échec à savoir que je devais être provoquée. C’était 1-0 pour l’échec. C’est fou, non?! Je n’avais même pas encore commencé à accoucher, que je me mettais déjà de la pression. Tu pouvais bien te cacher encore un peu …

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S’en suivent les étapes de pitocin, de contractions, de complications… mais bon, les détails sont sans pertinence dans cette histoire puisque l’on oublie rapidement la douleur des interventions médicales. C’est cette douleur de ne pas t’avoir pris dans mes bras la première qui est restée longtemps.

Vois-tu, mon petit amour, lorsque tu es arrivé à destination, ça faisait déjà 22 heures que je me battais contre le destin sous les encouragements de ton papa et de celle qui allait devenir ta fée marraine. Finalement, le verdict est tombé : on fera ta rencontre dans la prochaine heure, mais ce sera à l’étage du haut, couchée sur une table glaciale dans une salle sans chaleur et le destin me jouera un tour; je n’aurai pas conscience de ton arrivée sur terre... c’était rendu 2-0 pour l’échec.

Sous l’effet du cocktail des médicaments et de l’anesthésie, je n’ai aucun souvenir de l’intervention. Je n’ai pas pu te souhaiter la bienvenue ni te dire que tout ira bien. Pire encore, ton père m’a raconté par la suite que lorsqu’il t’a approché de moi, j’ai dit d’un ton ramolli : « je le verrai plus tard ». Ces 5 mots ont résonné longtemps dans ma tête. Moi, ta mère, qui rêvais à ce moment depuis 9 mois, de faire ta rencontre, celle qui avait bâti une histoire d’accouchement parfait pour nous deux où je devais être la première à te bécoter, je t’ai rejeté à notre première rencontre avec ces 5 mots.

Finalement, c’est quelques heures plus tard, après ma reprise de conscience, que j’ai pu enfin te serrer. Tu étais déjà lavé et tu portais ta première petite couche. J’étais si triste de ne pas avoir pu goûter à ton parfum de nouveau-né. Ton papa avait fait le premier peau à peau avec toi. Ta fée marraine (ma sœur d’amour!) t’avait eu dans les bras (donc avant moi!) afin que papa retire son chandail pour te coller contre lui. Bravo l’échec, j’ai compris; il avait gagné la partie.

Tout cela, pour une nouvelle maman, c’était beaucoup de tristesse et bonjour les hormones et le manque de sommeil qui multiplient par 15 la déception envers moi-même. En fait, j’ai souvent dit par la suite que je n’avais pas été capable d’accoucher.

Tu sais, comme dans tous les événements de la vie, le temps et le recul font du bien. Tout est une question de perspective. C’était mon premier pas vers la résilience. Je me suis beaucoup questionnée sur mon désir de performer durant ta première année de vie et sur ma capacité à trouver le bonheur dans le moment présent. Tout a commencé par cet accouchement, notre histoire à nous deux.

Un jour, lorsque tu me demanderas de te raconter le jour de ta naissance, je te raconterai cette belle leçon de vie, la fois où :

J’ai vu mon mari devenir un papa rapidement par la force des choses, une force tranquille, un pilier qui a tout pris en charge pour laisser maman remonter la pente.

La chance que tu as eue d’être pris dans les bras de ta fée marraine au lieu d’une infirmière inconnue pour laisser papa se préparer à te coller contre son corps chaud.

Que même si je ne me souviens pas des détails de cet accouchement, je connais tout le reste de ton existence sur le bout de mes doigts parce que le quotidien, je le passe avec toi!

Mon petit citron d’amour, notre rencontre est la plus belle des histoires parce que c’est celle qui t’a mené à moi. Alors tu sais quoi, on l’a gagné cette partie!

Échec et mat.

Article rédigé par Isabelle George

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