La tristesse de mon coeur de mère
Certains vont me trouver mère poule. Ils n’ont pas tort (même si je n’aime pas toujours l’avouer). Mes enfants ont maintenant 9 (presque 10) et 7 ans. Ce n’est que depuis septembre que je les laisse marcher seuls pour se rendre à l’école.
Le jour, pendant que mes enfants sont à l’école, la plupart du temps, je travaille de la maison et je les accueille pour le dîner. Ensuite, ils reviennent après l’école. C’est notre routine, jour à après jour. Lorsqu’ils sont en classe, en tant que mère, je n’ai aucun souci. Ils sont à l’école donc nécessairement, ils sont en sécurité, non ?
Onze jours avant Noël, une vingtaine d’enfants et d’adultes viennent d’être tués, dans une école primaire au Connecticut. Tout comme moi, les parents de ses enfants ont envoyé leurs petits amours à l’école ce matin, sans souci… ni crainte.
Ce midi, mes enfants étaient tellement contents. Fiston me disait que cet après-midi, il aurait une période de jeu. Ma grande m’expliquait qu’elle n’aurait pas beaucoup de devoirs la semaine prochaine. Et fiston a ajouté que la semaine prochaine serait remplie d’activités intéressantes.
Vingt enfants au Connecticut n’auront pas cette chance, eux, de raconter leur avant-midi à leurs parents et de s’amuser à l’école la semaine prochaine.
Demain, nous passerons la journée à Montréal. Les enfants vont se faire couper les cheveux et nous allons probablement dîner à notre restaurant préféré au centre-ville. Une belle journée en famille où nous passerons du temps de qualité ensemble.
Ces enfants, qui sont partis beaucoup trop vite, ne pourront pas, eux, passer une belle fin de semaine avec leurs familles ni manger à leur restaurant préféré.
Dimanche, nous allons entamer le processus « bagages », car nous partons dans quelques jours pour des vacances en Floride. Cette année, nous voulions fêter Noël sous le soleil de la Floride.
Ces enfants, tués au Connecticut, vont créer un vide immense durant le temps des Fêtes. Ils ont peut-être même déjà des cadeaux sous le sapin. Qui va les ouvrir ?
Que ce soit un père qui tue ces enfants, une mère qui noie ces enfants ou un fou qui tue plusieurs enfants… AUCUN enfant ne mérite d’être tué. Aucun.
Mon cœur de mère est rempli de peine. Je pense à ces familles qui ont perdu un enfant. À ces petits cœurs qui avaient probablement très peur et qui se sentaient sûrement seuls. Comment peut-on tenir un fusil, le placer devant un enfant et tirer ? Je ne comprends pas et ne comprendrai probablement jamais.
Mon cœur de femme ne comprend pas trop ce qui se passe. En vous écrivant ces lignes, je suis encore sous le choc.
Mon cœur de citoyenne est rempli de rage. Comme société, qu’est-ce que nous pouvons faire pour prévenir ce genre de situation ? Je lisais sur mon fil Twitter que depuis la tuerie (je déteste vraiment ce mot) à Columbine en 1999 il y eut 31 tueries aux États-Unis. 31. À mon avis, c’est beaucoup trop. Si en 10 ans, nous sommes témoins de 31 tueries, ce sera quoi dans 20, 30, 40 ans ? Et nos enfants, et les enfants de nos enfants ? Va-t-on revenir à l’époque où l’on enseignait à la maison, car nous aurons trop peur d’envoyer nos jeunes à l’école ?
Bref, il faut faire quelque chose. Comme mère, comme parent, nous avons une responsabilité envers nos enfants : assurer leur avenir et leur sécurité.
La mère en moi va serrer fort ses enfants lorsqu’ils reviendront de l’école et je vais leur rappeler à quel point je les aime. Aujourd’hui, je suis très reconnaissante qu’ils reviennent à la maison en santé, heureux, aimés et, surtout, en sécurité.
La femme et membre de cette société en moi va réfléchir longtemps et, dans la mesure du possible, poser des gestes pour mieux comprendre et faire en sorte que mes enfants demeurent en sécurité.
Mes pensées ce soir et pendant les jours, les semaines et les mois à venir seront avec ces familles qui doivent maintenant surmonter l’inimaginable. Je leur souhaite du courage, car, malheureusement, les jours qui s’en viennent seront extrêmement difficiles.
Puis la prochaine fois que je vais me sentir comme une mère poule… je vais l’assumer complètement.