Lettre à mon fils
J’ai toujours su. Quelque part dans le fin fond de mon coeur de maman, j’ai toujours su qu’un jour tu me dirais ces mots (ou du semblable). Depuis ta plus tendre enfance, tu fais tout différemment. Tu es plus doux, plus posé, plus calme et beaucoup plus à l’écoute de tes sentiments que tous les autres p’tits gars de ton âge. Jamais de ma vie je n’avais rencontré un jeune bonhomme de même pas deux ans avec une capacité d’acceptation de l’autre telle que la tienne.
Toi le p’tit homme au grand cœur qui allait toujours vers les « pas pareils », les autres p’tits minous avec des enjeux ou bien ceux qui n’arrivaient juste pas à se faire une place…je voyais bien que ton grand cœur venait du fait que tu étais loin d’être comme tout l’monde. Tu étais emphatique. Tu te portais à la défense des autres (et tu le fais encore). Tu t’entourais d’enfants comme toi qui, plus souvent qu’autrement, étaient des petites filles.
Très tôt, tu as décidé que le vernis à ongles, le maquillage et les souliers à talons hauts de ta grand-mère étaient les meilleurs jouets du monde. Tu as trippé lorsque cette même grand-mère t’a offert un « bébé » pour Noël. Les yeux pleins d’étoiles, tu as joué au papa…parfois à la maman. T’étais « fluide » comme ça dans tes jeux. Tu adorais ta cuisinette même si on disait autour de toi que c’était un jeu de p’tite fille. Tu allais naturellement vers les choses douces…tu le fais encore d’ailleurs.
Les choses ont continué d’évoluer, tu as grandi, tu as changé, mais tu es toujours resté sensible et près de tes émotions. Et puis un matin, lorsque tu avais environ 7 ans, tu m’as dit que tu ne savais pas toi tu allais te marier avec une fille ou un garçon. À 7 ans, les enfants ne disent pas ce genre de choses. Tu m’as lancé ça et tu as continué à jouer comme si ces mots ne venaient pas tout juste de sortir de ta bouche. Le plus drôle c’est que je n’ai eu aucune réaction. J’ai dit ok mon minou, tu feras bien ce que tu voudras.
Cette façon de penser, je ne l’ai jamais perdue. Je me suis toujours dit que j’accepterais mes enfants tels qu’ils étaient et que je ne tenterais jamais de les changer. Au fond, qui suis-je moi pour vous dire qui aimer et comment le faire? Ton père et moi, on s’est promis très tôt (avant même de vous avoir) que vous pourriez être qui vous êtes, sans aucune pression. D’ailleurs, entendre parler des « gay camps » où certains parents envoyaient leurs enfants se faire guérir de cette « maladie » nous donnait la nausée.
Je n’ai donc pas été surprise cette semaine lorsque tu es « sorti du placard ». En fait, tu n’y as jamais été. Tu n’avais juste pas encore prononcé les mots. Et cette semaine, pendant le souper, toi et moi on jasait et le sujet est venu…et je t’ai demandé si un jour tu te sentirais prêt à avoir « cette » conversation-là…parce que celle des « condoms dans la salle de bains » on l’a eue l’autre jour. Tu m’as lancé rapidement « ben oui m’man, tu sais bien ». Je sais quoi au juste, que t’aimes les gars…les filles? Les deux que tu réponds. Et là, j’aurais aimé voir mon visage parce que je pense que la face allait me craquer tant je souriais. Tu me faisais enfin assez confiance pour m’avouer ce que je savais déjà.
Dans tout ça, une chose est sûre, t’es mon fils et je t’aime. Et ça, ça ne changera jamais.
Texte anonyme
Une question légitime à se poser quand on vient de traverser des semaines intenses comme Véronique...